Les trois mariages de Madeleine

Ecrit par

Brigitte Billard

Publié le

Temps de lecture : 7 minutes



Geneatech nous propose en ce mois de mai de parler des remariages de nos ancêtres.

J’ai commencé par regarder combien parmi les ancêtres de mes enfants, du moins ceux pour lesquels j’ai au moins un mariage enregistré dans ma base sur Heredis, s’étaient mariés plus d’une fois.

Petite récolte. Sur 667 hommes et 666 femmes appartenant au groupe des Sosa de mes enfants, ayant au moins un mariage enregistré dans Heredis, ne se sont mariés deux fois que 60 hommes et 40 femmes, et 3 fois que 8 hommes et 2 femmes.

L’une des deux femmes est Margaretha Brand, qui vécut à la fin du XVIe siècle à Bâle, en Suisse, et dont je sais qu’elle eut trois époux successifs uniquement à travers les généalogies plus ou moins officielles de sa lignée trouvées sur internet. Elle est à l’origine d’une descendance qui compte des personnages prestigieux, savants, artistes, deux prix Nobel, mais je n’ai pas encore validé ces différentes informations.

Parlons donc aujourd’hui de l’autre, de Madeleine Reil, issue d’une famille moins prestigieuse, une famille de maçons à Parthenay, et qui est morte le 11 avril 1726, dans la paroisse Saint-Jean de Parthenay, à un âge qui m’est encore inconnu.

J’ignore toujours quand Madeleine est née.

Elle est la fille de Nicolas Reil et de Françoise Chiron, qui s’étaient mariés le 1er mai 1673 dans l’église Saint-Jean de Parthenay. Leur acte de mariage dans le registre paroissial est succinct.

auiourdhuy premier jour de may mil
six cent soixante et treize ont esté
espousés en face de nostre mere saincte
eglise et avecque touttes les ceremonies
accoustumées nicolas reil fils de sire
nicolas reil et de deffuncte marie de
launay ses pere et mere avec que
honneste femme francoise chiron
en presence des soubsignez et ont
declarez lesdits espoux ne scavoir
signer

Nicolas et Françoise ont cinq enfants, dont j’ai du mal à tracer l’existence. Pourtant, les registres de Parthenay sont plutôt complets et assez bien tenus.

  • Françoise est baptisée le 15 février 1674 en l’église Saint Jean, elle est probablement l’ainée de la fratrie. Je suppose qu’elle est morte avant l’âge adulte, sans aucune certitude.
  • Jean est baptisé le 22 décembre 1682 en l’église Saint-Laurent de Parthenay. Je n’ai pas encore retrouvé sa trace à l’âge adulte.
  • Françoise, une seconde fille portant le même prénom que l’ainée de la fratrie, est baptisée le 19 octobre 1688 à Saint-Loup-sur Thouet

Je sais que le couple a deux autres filles : Jeanne Reil, qui épouse le 31 janvier 1707 à Parthenay Pierre Lierre, et dont l’acte de mariage précise bien les parents, et Madeleine, ma Madeleine, mon ancêtre à la 10ème génération.

De l’enfance de Madeleine, je ne sais rien, sauf que sa mère, Françoise Chiron, est morte avant octobre 1692 – où et quand ? – puisque son mari Nicolas Reil se remarie le 26 octobre 1692 avec Françoise Viault.

L’acte de mariage n’est pas plus détaillé que celui rédigé lors des premières noces de Nicolas, mais il ne laisse pas de doute sur le décès de la première épouse.

Aujourd huy vingtsixiesme jour d octobre
mil six cent quatre vingt douze ont esté
epousés par moy curé soussigné
les ceremonies de l eglise _ _
_ _ nicolas Reil veuf de françoisse
chiron de la paroisse de Saint Jean
ayant certificat de monsieur le curé dudit
Saint Jean avec françoisse viault
veuve de charles Robin ma paroissienne
fait ledit mariage en présence des
soubsigné et autres qui ont
declaré ne scavoir signer

Un contrat de mariage a été passé entre les futurs époux le 7 octobre précédent, j’en ai demandé une copie aux archives départementales, mais sans succès pour l’instant. Peut-être y trouverai je des renseignements supplémentaires concernant le sort des enfants de Nicolas et Françoise.

Le 9 avril 1694, Nicolas, qui est marié depuis peu et père d’au moins deux filles, Jeanne et Madeleine, meurt « en la maison de charité » de Parthenay, c’est à dire à l’hôpital. Il est inhumé au cimetière Saint Jean.

Quand les archives des Deux-Sèvres mettront en ligne les registres des notaires, j’espère y trouver de quoi compléter cette histoire.

Mais pour l’instant, je ne sais rien de plus des parents de Madeleine. Elle est née dans la région de Parthenay entre 1675 et 1692, et j’imagine que sa soeur et elle ont été prises en charge par la seconde veuve de leur père, ou par un oncle ou une tante, quand elles se sont retrouvées orphelines.

Madeleine apparait pour la première fois – selon mes recherches à ce jour – dans un registre dans l’acte de mariage daté du 26 novembre 1705, à l’église Saint Jean de Parthenay. Elle y épouse Jacques Pavin, droguetier, fils de Balthazar Pavin et de Marie Chauvin.

Le vingt six novembre mil sept cent cinq apres les
publications des bans duement faite ne s’étant trouvé
aucune opposition ni empeschement, dans la presence et
du consentement de leurs plus proches parens j ay epousez
Jaques pavin fils de balthazar pavin et de marie chauvin
ses pere et mere et madelene Reil fille de deffunts
nicolas Reil et françoise chiron aussi ses pere et mere

Le 15 août 1707, elle met au monde une petite fille, Marie Jeanne Pavin, enfant posthume si j’en crois son acte de baptême.

Le seizieme d oust mil sept cent sept j’ay
baptizé marie jeanne fille de deffunt jaque pavin
et de madelene Reil ses pere et mere née du
jour précédent, son parain a été moniseur Jaque
Biget et sa maraine madame Jeanne Riviere

Oserais je vous avouer que je n’ai pas non plus trouvé l’acte de sépulture de Jacques Pavin, alors que je connais la paroisse où le couple réside et que la période est très restreinte ?

Madeleine se retrouve veuve moins de deux ans après son premier mariage.

Il faut pourtant presque un an pour qu’elle se marie une seconde fois, épousant à l’église Saint Jean de Parthenay le 18 juin 1708 Pierre Bazille, baptisé le 15 octobre 1686 en l’église Saint-Laurent, et donc âgé de 21 ans. Pierre Bazille est maçon, il est le fils de François Bazille, décédé lors du mariage, et de Marguerite Panier.

J’imagine qu’un contrat de mariage a été passé, je n’en ai pas encore trouvé la trace.

Le dix huict juin mil sept cent huict
apres la publication des bans duement
faite d’une part dans ma paroisse et de
l’autre dans la paroisse de st laurent, vu
le certificat de monsieur le curé de
la ditte paroisse, ne s’étant trouvé aucune
opposition ni empeschement, j’ay en
presence et du consentement de leurs plus proche
parens donné la sainte benediction nuptiale
a me pierre bazile fils de deffunt françois bazile
et de marguerite panier de la sus ditte paroisse de
st laurent, et a madeleine Reil veuve de Jaque
pavin de ma paroisse

Madeleine Reil et Pierre Bazille vont vivre ensemble un peu plus de onze ans, onze ans seulement. Ils ont ensemble quatre enfants.

  • Marie Madeleine Bazille, baptisée le 25 juillet 1709 en l’église Saint Jean, qui épouse le 26 juin 1730 Jean Caillon, avec qui elle aura au moins cinq enfants
  • Jacques Bazille, baptisé le 31 décembre 1711 en l’église Saint Laurent, maçon de son état, qui épouse le 18 Janvier 1734 Marie Renée Caillon, avec laquelle il aura au moins dix enfants, dont Jacques Bazille, prêtre, chanoine de Sainte Croix, défroqué lors de la Révolution, dont je vous ai raconté l’histoire.
  • Gabriel Bazille, mon ancêtre, baptisé le 10 décembre 1714 à Saint-Laurent, qui va se marier trois fois lui aussi
  • Anne Bazille, baptisée le 12 septembre 1717 en l’église Saint-Laurent, la seule des quatre enfants à mourir jeune, sans descendance.

Madeleine aurait peut-être eu d’autres enfants de Pierre Bazille, mais il meurt à 33 ans le 30 novembre 1719.

Madeleine a probablement une quarantaine d’années, et se retrouve veuve pour la seconde fois, avec cette fois ci cinq enfants à nourir et élever, dont l’ainée, Marie Jeanne Pavin, n’a que 12 ans.

Elle n’a pas d’autre choix que de retrouver à nouveau un mari. Et pourtant, il semble que le mariage va un peu trainer.

Le 21 août 1720, donc presque neuf mois après le décès de Pierre Bazille, probablement pour s’assurer qu’elle n’était pas enceinte lorsqu’elle est devenue veuve, Madeleine Reil et une partie de la famille de Mathurin Clisson, maçon, se retrouvent dans l’étude de maitre Charles Claveau, notaire à Parthenay. Sont mentionnés dans l’acte un des frères et une des sœurs du futur époux. Les clauses du contrat de mariage concernent principalement le sort des cinq enfants de Madeleine, une de son premier mariage, quatre du second, qui pourront rester dans la nouvelle communauté formée entre Madeleine et son futur mari jusqu’à leurs 25 ans, s’ils le souhaitent.

On pourrait penser que le mariage religieux va survenir quelques jours plus tard.

Ce n’est pourtant que le 26 août 1721 que le mariage religieux du couple est consigné dans le registre de la paroisse Saint Laurent.

m clisson et Reil
Le vingt six aoust mil sept cent vingt un en l eglise
de st laurent de parthenay par devant moy curé soussigné
en presence des temoins cybas nommés mathurin clisson
maçon fils de deffunt mathurin clisson et de perine
bichaud et madelene Reil veuve en premiere noce
de jacques pavin droguetier et en seconde de pierre
basile maçon tous deux de cette dite paroisse, se sont
reciproquement pris a mary femme et epoux et ne
s etant apparu aucune opposition ny empeschement
par la publicaiton des vans deument faites je leur
ay donné la benedition nuptialle en presence de
denis clisson frere de l epoux de pierre Renaudeau
beau frere de ladite epouse de jean Carré maçon de
Charles girault cousin ?, qui ont tous declaré ne
scavoir signer fors les soussignés

J’ai vérifié plusieurs fois la date indiquée sur le contrat de mariage et les actes du registre.

J’imagine qu’il pourrait y avoir une erreur sur le contrat de mariage, mais je ne pourrai le vérifier qu’avec le répertoire du notaire. Quelle autre raison pourrait expliquer ce délai d’un an – et une semaine – entre la signature du contrat de mariage et le mariage religieux ?

L’histoire est d’autant plus compliquée à comprendre que le 28 octobre 1721, soit trois mois seulement après le mariage religieux, Madeleine met au monde une petite Jeanne, fille de Mathurin Clisson.

Madeleine et Mathurin ont ils vécu ensemble sans être mariés religieusement une fois que le contrat avait été signé ? J’ai du mal à le croire … Mais le registre paroissial n’est pas erronné. Quelques pages après le mariage des parents, on trouve le baptême de la petite Jeanne.

Je ne saurai jamais ce qui a retardé la célébration du mariage, et je reconnais que cela me frustre un peu.

Madeleine a maintenant six enfants, nés de trois maris différents.

Quel âge a t’elle quand elle meurt, moins de cinq ans plus tard, le 11 avril 1726 ? Mathématiquement, elle ne peut pas avoir plus de 50 ans, et probablement autour de 45 ans.

Malgré sa courte vie, Madeleine a une nombreuse descendance, de chacun de ses trois maris. Elle fait partie de ces ancêtres sur lesquels je veux continuer à travailler, dont je veux mieux comprendre la vie.

Pour cela, il me faudra me plonger dans les actes notariés, aux archives départementales des Deux Sèvres, à Niort, lors j’espère d’un séjour au début de l’automne.


5 réponses à “Les trois mariages de Madeleine”

  1. Cam

    Bonjour,
    C’est toujours un plaisir de lire votre blog!
    J’ai moi aussi le cas d’un couple d’ancêtres dont le contrat de mariage a été passé en 1798 avant que le mariage soit célébré en 1801. Dans mon cas , je pense que mes ancêtres ont été victimes de l’histoire. Ils habitaient dans le nord de la Vendée lorsqu’en 1799 de nouvelles batailles éclatèrent. Peut-être vos ancêtres ont-ils dû faire face à des circonstances particulières?

  2. Dès qu’il y a un accroc dans la vie de nos ancêtres, je suis comme toi, je trouve frustrant de ne pas en avoir l’explication… et je me fais des tas de films.
    C’est vrai que c’est intrigant cet écart entre le contrat et le mariage, alors que parfois ça se fait dans la même journée. On a toujours tendance à penser que ça se résume à des histoires d’intérêt mais pas que… sinon la petite Jeanne n’aurait pas existé 😉

    1. Brigitte

      J’étais persuadée d’avoir mal reporté une information, mais non ca correspond aux actes que j’ai récupérés et je suis perplexe
      J’aimerais parfois avoir l’endurance et le talent pour transformer certaines vies en roman
      Reste mon imagination

      Merci du commentaire
      Brigitte

  3. zélie jumel

    Bonjour, j’ai dans mon arbre, un ancêtre direct qui s’est marié 4 fois et dont j’ai raconté l’histoire dans mon mémoire de recherche, cela me parle donc beaucoup. J’aime beaucoup vous lire et j’aimerais franchir le pas et créer un blog de généalogie aussi un jour ! Bien à vous ! Zélie

    1. Brigitte

      Lancez vous 🙂
      Il y a des outils faciles à utiliser, et vous n’aurez plus qu’à écrire – pour votre plaisir d’abord

      Merci pour votre gentil commentaire qui me fait chaud au coeur
      Brigitte

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