Dernièrement, j’ai repris les cousinages identifiés au niveau des analyses ADN de ma famille, pour tenter de mettre en place une grille d’analyse et de confirmation de chacun des résultats. Et j’ai eu des surprises.
Au niveau de ma branche maternelle, mon arbre compte un grand nombre d’implexes, sans toutefois qu’on puisse parler d’endogamie. Mais le fait que mes grands-parents maternels soient cousins issus de germain fausse la grille de lecture des résultats, telle qu’elle est habituellement calculée dans le Shared cM project ou les statistiques utilisées par Ancestry ou MyHeritage pour déterminer une estimation de cousinage. De plus, il est fréquent que je cousine généalogiquement avec une correspondance ADN par plusieurs couples d’ancêtres différents, alors que génétiquement, il est plus probable que la correspondance génétique ne puisse être attachée qu’à un seul couple d’ancêtres.
Prenons par exemple un des cousins généalogiques et génétiques de maman, l’animateur de télévision Jean Pierre Foucault.
Entre maman et la branche paternelle de Jean Pierre Foucault, originaire de Latillé et ses communes proches, il y a – au moins – quatre couples d’ancêtres communs différents : Philippe Bouquet (1665-1694) et Jeanne Fradet ( 1663-1698); René Girault (1706-1777) et Marie Guillot (1705-1754) du côté du père de maman, François Quintard (1795-1869) et Françoise Chartier (1801-1893); Louis Rafin (1702-1781) et Renée Poupilleau (1703-1782) du côté de la mère de maman.
Comme vous le voyez ci-dessus, l’arbre commun de maman et son cousin célèbre est assez complexe. Et je ne suis pas sûre d’avoir identifié toutes les lignées communes.
D’un autre côté, l’ADN commun entre eux calculé par MyHeritage est de 51,5 cM sur 3 segments et MyHeritage propose des cousinages possibles.
Maman et Jean Pierre Foucault sont quasiment de la même génération. On peut donc extrapoler du schéma de MyHeritage qu’ils pourraient avoir en commun des arrières arrières grands parents – donc le couple François Quintard et Françoise Chartier – ou deux générations au dessus, le couple Louis Rafin et Renée Poupilleau.
Les statistiques du Shared CmProject me donnent à peu près les mêmes pistes, plutôt arrières arrières grands parents, mais là aussi d’autres relations restent possibles.
Si je n’ai pas de correspondance triangulée pour maman et Jean Pierre Foucault, je ne peux pas avec certitude aller plus loin, et décréter que leur cousinage génétique vient bien du couple François Quintard x Françoise Chartier. Mieux encore, ils ont trois segments en commun, et rien n’oblige à ce que ces trois segments viennent exactement du même couple …..
Donc sans triangulation, c’est à dire sans une troisième correspondance permettant de confirmer ou d’infirmer une lignée, je ne peux pas être sûre de la relation génétique entre maman et son correspondant, alors même qu’ils partagent 51,5 cM – ce qui dans mes statistiques est une correspondance plutôt élevée.
Mais pourquoi est ce un problème, allez vous me dire ?
Sur l’exemple que je vous donne, cela n’en est pas vraiment un. Mais imaginez que je sois une personne qui cherche ses parents biologiques en utilisant l’analyse ADN, et que je sois en correspondance triangulée à la fois avec eux deux. La triangulation signifierait que je descends d’un couple d’ancêtres communs à eux – et à moi bien sûr – mais lequel ? Imaginons ensuite que je réussisse à remonter les arbres de ces deux personnes, et que je tombe sur une correspondance, celle par exemple de Louis Rafin et Renée Poupilleau, sans avoir vu qu’une autre possibilité existait. Je partirais alors probablement sur une piste totalement erronnée.
Certes, vouloir retrouver des parents biologiques avec une correspondance inférieure à 100 cM n’est pas recommandé, mais je veux insister sur le fait que quand vous reconstituez l’arbre généalogique de vos correspondances ADN, il est important de ne négliger aucune branche. Si l’ADN partagé est de moins de 100 cM, vos ancêtres communs vont probablement avoir vécu à au moins quatre ou cinq générations de vous, et peuvent avoir vécu dans des régions où leurs familles étaient implantées depuis longtemps, avec un nombre conséquent d’implexes. La première branche généalogique commune que vous retrouverez ne sera pas forcément la branche où vous aurez une correspondance génétique.
Le dire et l’écrire, c’est bien, mais la pratique est plus compliquée.
Je n’ai pas beaucoup de correspondances dans les analyses ADN de maman – 746 à ce jour dont seulement 11 ont avec maman un segment en commun de plus de 20 cM. Je connais bien sa généalogie sur au moins sept générations, à part la lignée d’Edvige Colnay, son arrière grand mère maternelle, enfant trouvée. On pourrait penser que j’ai pu replacer les 11 correspondances génétiques de maman dans son arbre sans difficulté. Pourtant, c’est loin d’être le cas, justement à cause des implexes de son arbre. Quelle piste suivre ? La première piste qui se présente est-elle la bonne ?
Prenons le cas de Françoise, que je viens de vérifier cette semaine pour me rendre compte que je n’avais analysé qu’une partie du problème, et que ma solution supposée n’était pas du tout certaine.
Françoise a mon âge, par rapport à maman elle est donc « 1R » – « once removed » – selon la terminologie anglo-saxonne particulièrement pratique quand on travaille sur les correspondances ADN. Elle est « issue de » par rapport à maman.
Françoise n’a pas d’arbre en ligne, mais elle répond rapidement à mon message. Elle me donne quelques éléments, le nom de ses grands-parents paternels et maternels et me précise que ses grands-parents maternels sont Roger Joltreau et Yvette Bigot, originaires d’Ayron.
Si vous avez lu mon article sur la photo de mariage de mes grands parents, le patronyme Bigot vous rappellera peut-être quelque chose. Emma Bigot, la marraine et cousine issue de germain de mon grand père Achille. Il suffit une vérification dans les registres d’Ayron, et je trouve la naissance d’Yvette. Yvette est la cousine germaine d’Emma, et donc la cousine issue de germain de mon grand père Achille Reau. La relation est immédiatement trouvée.
Bingo ….
Oui ….. mais non …
Avez vous remarqué avec quelle vitesse j’ai sauté sur cette correspondance, sans me poser de question, et sans même vérifier si les correspondances calculées concordaient avec les statistiques ?
Erreur de quasi débutante, je n’avais pas encore à l’époque lu les livres de Blaine Bettinger et Diahan Southard, assisté aux conférences de Birmingham, Amsterdam ou Londres. J’ai appris beaucoup de choses en 2019, et il est temps que je les mette en oeuvre.
Reprenons les bases. Quelle est la correspondance entre maman et Françoise ?
Pour MyHeritage, la correspondance se situerait probablement au niveau des arrières arrières grands parents de maman.
C’est en effet la seule correspondance 1R – once removed – que MyHeritage propose.
Les possibilités – comme toujours – sont plus nombreuses dans le tableau du Shared cM project.
Diahan Southard recommande de vérifier sur votre arbre les zones potentielles de cousinage.
Voici l’arbre de maman, sur lequel j’ai surligné Pierre Alnet, ancêtre commun potentiel de maman et Françoise.
J’ai également matérialisé les générations, pour m’y retrouver plus facilement.
La correspondance entre maman et Françoise pourrait être 2C1R, 3C1R, 4C1R, 5C1R. Si Pierre Alnet est leur ancêtre commun, leur relation est 5C1R, donc Pierre Alnet est bien une possibilité. Mais est ce vraiment la seule ? Comme je l’ai dit plus haut, sans triangulation avec une tierce personne, difficile d’être sûr de la relation. Et je n’ai pas vraiment fait l’arbre de Françoise, je suis partie d’une grand mère maternelle que je connaissais, sans faire davantage de recherches.
Et s’il y avait d’autres ancêtres communs entre maman et Françoise ?
La mère de Françoise est née à Ayron, alors que son père est originaire des Deux Sèvres, d’une région où je ne me connais pas d’ancêtres. Mais bien sûr, cela ne veut rien dire, il faudrait probablement fouiller là aussi.
Je vais donc commencer par travailler sur le grand père maternel de Françoise, Roger Joltreau, lui aussi né à Ayron. La mère de Roger Joltreau est Marie Eugénie Froment, la fille de Pierre Froment, la petite fille de Jeanne Bondonneau – Jeanne Bondonneau, la soeur de Sophie Bondonneau, arrière arrière grand mère de maman.
Me voici avec un second cousinage, au niveau de Jacques Bondonneau et Renée Guillon.
Cette fois ci le cousinage serait 4C1R, toujours dans les critères possibles de MyHeritage ou du Shared cM project ….
Et qui plus est, Pierre Alnet était un ancêtre de Clémentine Pelletier, alors que Jacques Bondonneau et Renée Guillon sont des ancêtres de son mari, François Reau.
Me voilà bien avancée, surtout que je n’ai pas encore remonté toutes les branches maternelles de Françoise sur six générations – ce qui correspond globalement au creneau temporaire dans lequel on peut trouver des correspondances génétiques.
Actuellement, Françoise et maman triangulent bien avec d’autres personnes, mais qui n’apportent rien à l’analyse, puisqu’il s’agit de la fille de Françoise, de mon frère, ma soeur et moi. Il me faudrait une triangulation avec une tierce personne extérieure à notre groupe pour pouvoir avancer sur cette recherche.
Comme je vous l’ai dit, cette recherche n’a pas vraiment de conséquences. Elle ne peut pas vraiment m’aider sur mon projet Edvige – du moins pour l’instant – et je connais les branches que nous avons généalogiquement en commun. Bien sûr, je pourrais continuer à explorer l’arbre maternel de Françoise, et peut-être collectionner d’autres couples d’ancêtres communs. Cela ne ferait que complexifier encore cette analyse. Ma seule issue est d’attendre – éventuellement – qu’une tierce personne triangule avec maman et Françoise pour reprendre l’analyse.
Maman n’a que 11 correspondances vraiment intéressantes pour l’instant, mais toutes ces correspondances sont dans le même cas : pour l’instant toutes me conduisent à plusieurs couples d’ancêtres communs, et je n’ai pu identifier avec un certain niveau de confiance que celles où j’ai une triangulation entre trois personnes.
Si vous faites des recherches pour retrouver les parents biologiques d’une personne, essayez toujours de travailler sur des triangulations d’au moins trois personnes. Il est déjà bien assez compliqué de faire une généalogie descendante complète d’un couple unique, autant que le couple qui vous sert de point de départ soit identifié avec un niveau de quasi-certitude.
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