Lors de ma visite aux ANOM en juin, j’ai récupéré une photo du registre matricule de François Jules César RISSE, le frère ainé de ma grand mère paternelle.
J’avais trouvé sa fiche de mort pour la France sur le site de Mémoire des Hommes.
Lors de recherches sur Gallica, j’avais découvert qu’en raison de son statut de soutien de famille et de la situation difficile dans laquelle se trouvait sa famille, il lui avait été alloué par le conseil municipal d’Alger une indemnité de 0,75 francs par jour pendant sa présence sous les drapeaux.
J’ai eu accès lors de ma visite aux ANOM à Aix en Provence à sa fiche matricule, que j’étudie depuis mon retour.
François est menuisier, comme son père et son frère Charles. Cheveux noirs, yeux bruns, son signalement n’est pas étonnant pour ce jeune homme dont les origines sont à 75% italiennes et 25% tarnaises. Plutôt petit pour nos critères actuels, 1m64, il a un niveau correct d’instruction générale et il est classé en ce début janvier 1909 comme Bon pour le service armé.
Il est affecté à la 19ème section d’administration militaire à Alger. Il arrive au corps le 7 octobre 1909, où il reçoit le matricule 351. Le 1er mai 1910, il est nommé soldat de 1ère classe, et le 15 octobre 1910 il est promu Caporal.
Le 24 septembre 1911, il est envoyé en congé en attendant son passage dans la Réserve de l’Armée Active, qui a lieu le 1er octobre 1911. Le certificat de bonne conduite lui est accordé. Il retourne chez lui, 4 rue Jenner à Alger, où vivent sa mère et ses trois jeunes frères et sœurs.
François a donc passé, comme le veut la loi depuis le 21 mars 1905, deux années à servir la France. Qu’il soit soutien de famille ne change plus rien depuis 1905. Sauf exemption physique, tout homme célibataire entre 20 et 25 ans doit deux ans de service militaire actif à son pays. Mais la loi ne s’arrête pas là, et en tout ce sont 25 ans que tout Français doit à son armée en ce début de 20ème siècle.
La fiche matricule de François est claire : au moment de son recensement militaire, en janvier 1909, il est indiqué qu’il passera dans la réserve de l’armée d’active en octobre 1911, puis dans l’armée territoriale en octobre 1922 et dans la réserve de l’armée territoriale en octobre 1928, pour être enfin libéré de ses obligations militaires en octobre 1934.
A Dieu ne plaise …
L’ordre de mobilisation générale est proclamé le 2 aout 1914. François est affecté au 4ème régiment de Zouaves, il quitte l’Algérie le 20 septembre 1914 à destination du fort de Rosny sous Bois, sous le matricule 04638 du répertoire du corps. Il arrive au corps le 21 septembre 1914 et est confirmé dans son grade de caporal. Sa fiche indique ensuite « Parti aux Armées »
Et c’est là que je m’y perds.
D’après l’historique du 4ème Zouaves, François a dû rejoindre le régiment dans la Marne. En octobre, la bataille de la Marne est terminée, les Zouaves s’y sont distingués. Ils restent sur le front avant de partir vers la Belgique, plus précisément Ypres en novembre 1914. A partir de janvier 1915, ils sont à Nieuport, et c’est là qu’ils vont se battre pendant toute la première moitié de 1915.
Parrallèlement, la fiche matricule de François me dit qu’il a été blessé le 16 mars 1915 à Mesnil lez Hurlus. Il est donc apparemment engagé dans la bataille de Champagne, dans laquelle ne se trouve pas engagé le 4ème régiment de Zouaves, sur le front de Belgique …. François passe deux mois à l’hôpital civil de Châlons-sur-Marne, l’actuel Chalons-en-Champagne. Le 25 juin 1915, après 7 jours de permission, il est versé au 170ème régiment d’infanterie. Étonnamment, c’est le 170ème régiment d’infanterie qui est au cœur des combats en mars 1915 dans le secteur de Mesnil lez Hurlus.
Je ne suis pas une spécialiste de l’histoire militaire, ni de l’armée, et je suis un peu perdue. Est il possible qu’il ait été affecté au 170ème RI avant sa blessure, mais que les papiers n’aient été régularisés que plus tard ? Comment puis je vérifier ces informations ? J’imagine qu’il faut que je consulte , quand le SHD sera à nouveau ouvert au public, les documents disponibles du 4ème zouaves et du 170ème RI, à commencer par les registres des régiments.
François est tué à l’ennemi le 12 septembre 1916, à Clery sur Somme. Il appartient alors, avec la 11ème compagnie, au 3ème bataillon, sous le commandement du chef de bataillon Orcel.
Le Journal de Marche et Opérations explique l’action qui a probablement coûté la vie à François et beaucoup d’autres de ses compagnons.
Je pourrais me contenter de ce que j’ai glâné, après tout je ne suis pas une historienne militaire. Et pourtant, deux « détails » me chagrinent :
- Pourquoi François a t’il été blessé au Mesnil lez Hurlus s’il faisait partie des effectifs du 4ème Zouaves ?
- Dans sa fiche matricule, il est indiqué une citation à l’ordre du régiment, N°168 du 2 ou 9 septembre 1916 – et – Ordre du Général N° 37 du 8 octobre 1916. Je n’ai pas trouvé les citations à l’ordre du régiment dans le JMO , j’ai sans doute mal cherché. Je reconnais que la lecture de ces documents me donne le cafard, et que j’ai du mal à en lire attentivement toutes les pages, une à une … J’ai probablement loupé la mention, mais il est bizarre que je n’en trouve aucune. Quant à cet ordre du Général, je ne sais même pas de quoi il s’agit. Pourtant, j’aimerais savoir à quoi François a dû cette citation.
François Jules César Risse est mort quand ma grand mère avait 9 ans, elle l’a elle même très peu connu, mais depuis que j’ai fait sa connaissance virtuelle, ce jeune homme, comme tous ses compagnons d’infortune que je croise au gré de mes recherches, a touché mon cœur. Comprendre ce qu’il a vécu et le partager avec vous ici, c’est ma façon de lui dire qu’il n’est pas totalement oublié dans son cimetière loin de son soleil natal.
[François Jules Cesar Risse]
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