T comme Toponymie

Ecrit par

Brigitte Billard

Publié le

Temps de lecture : 3 minutes




Pour cette nouvelle participation du blog au Challenge AZ initié par Sophie Boudarel, de la Gazette des ancêtres, je vous emmène sur les terres ancestrales de ma mère, dans le village de Latillé en Poitou.


Les publications des sociétés savantes sont une mine quasiment inépuisable pour ceux qui veulent en savoir plus sur l’histoire d’une région. Pour la Vienne, la Société des antiquaires de l’Ouest, dont 70 numéros sont disponibles en ligne sur Gallica, entre 1834 et 1946, est une de mes sources de prédilection.

En 1930, Léo Fayolle publiait un article intitulé « Notes de Toponymie poitevine« , pour revenir sur les communications déjà faites par la société sur les noms de lieux de la région. 

Voici ce qu’il y écrit concernant Latillé.

23° LATILLE.
Commune du canton de Vouillé, Vienne.
Villa Latiliacus super fluvium Alsantia, 951; Lateleio, 1092; Latilhé, 1273; Lateilhé, 1496; La Tillé,1644.
Comparons Latillé et ses formes anciennes à La Teillée, village, à Saint-Sauvant; La Tillée, Charente-Inférieure; La Thillaye, eure-et-Looir. Ces rapprochements permettent de conclure que la latinisation Latiliacus de 951 est erronée. Latillé n’a jamais été un nom en acum: la preuve en est qu’il n’a jamais eu, avant de se terminer en é, la forme, ni persistante en Poitou, ec.
La Tillée est dont simplement La Teillée, la plantation de tilleuls(1).
Latilly, aisne, doit être une tilieta (2), comme Latillé.
Par contre Tillac, Charente, Gers, et encore plus Le Tillarc avec article, Vienne, Deux-Sèvres, sont tout différents pour le toponymiste. ces noms prouvent que le suffice acum s’est joint à des appellatifs, et à des noms communs (3). Tillac, mais surtout Le Tillac, feront réfléchir avant d’admettre l’hypothèse d’une formation avec le gentilice Tilius, d’ailleurs attesté dans C I L, XIV,780. Ces toponymes invitent même à penser que les formes masculines Teillé, Loire-Inférieure, Sarthe; Le Tilly, Loire-Inférieure, et les très nombreux Tilly, allier, Aube, Calvados, Cantal, etc., ne sont pas toujours des tilietum, mais peuvent être, eux aussi, des Tiliacum, toujours au sens de plantation de tilleuls.
Je crois offrir, ici, une preuve nouvelle qu’il y a des toponymes en acum qui sont de simples appellatifs ou noms communs.
(1) Tilia, tilleul, en vieux français, teil ou theil. L’i de 1re syllabe, bref et accentué, suivi de l et d’un yod fait eil avec mouillure de l. Cf. consilium, conseil; pariculum, pareil; auricula, oreille.
(2) Par les intermédiaires Tilyée, Tilyé, Tilyi.
(3) Tillac doit nécessairement provenir d’un nom à suffixe acum, car le toponymiste érige en loi, ne comportant presque pas d’exceptios, que s’il y a des latinisations indues en acum – comme Latiliacus en 951 – elles n’ont pas d’influence sur les formes françaises. Donc Tillac ne peut être un tilietum.

Ne soupirez pas. Je suis d’accord, c’est une communication savante à une société savante, en 1930. On n’écrirait plus comme ça aujourd’hui. Mais le sens du communiqué est clair.

En substance, Léo Fayolle prouve que l’origine de Latillé est clairement La Teillée, la plantation de tilleuls.

Dans les registres paroissiaux de Latillé, on trouve fréquemment la graphie La Tillé dans les actes, que ce soit à Latillé ou dans les paroisses alentour. C’est par exemple sous cette forme que le nom de la paroisse est écrit dans le contrat de mariage passé entre mes ancêtres Jean Peroche et Radegonde Roblin, à Neuville-de-Poitou.

AD86 – 4 E 39

Et c’est aussi ainsi qu’on trouve une rue de La Tillé sur le cadastre napoléonien de Neuville.

AD86 – 4P 1146 – Section I – 1818

Reste à savoir où étaient ces plantations de tilleuls, dont je n’ai pas de souvenirs. Il y a le long de l’Auxance – dit aussi super fluviam Alsantia en 951 – de nombreuses plantations de peupliers, mais leur origine est récente – enfin, disons qu’elles sont là depuis mon enfance, mais pas vraiment plus longtemps.

Credit Photo Les Amis du Bourg – les plantations de peupliers et le Petit Bourg

Des tilleuls dans le village, il y en a bien sûr, l’odeur des tilleuls en fleurs appartient à ma mémoire olfactive, sans que je sois vraiment sûre que ce soit un souvenir de Latillé, et pas plutôt du tilleul qui poussait dans la cour de la gendarmerie à Rebais, où j’ai joué pendant de longues années. A défaut d’un tilleul de Latillé, voici un tilleul de Gâtine, du village de Verruyes à quelques lieues de Latillé.

Le tilleul têtard des Ecarlatières

Si vous voulez vous promener visuellement dans Latillé, maintenant qu’on approche de la fin de ce challenge d’écriture que j’ai consacré à la commune, je vous recommande de regarder le diaporama réalisé en 2005 par les Amis du Bourg de Latillé

Sophie Boudarel vous avait parlé de phytotoponyme – que de mots barbares dans cet article du jour ! – et voici que je constate que Latillé appartient aussi au « genre » des phytotoponymes …. 

Quoi de mieux quand on fait de la généalogie, quand on passe son temps libre à faire pousser son arbre ou celui de ses amis, que de découvrir qu’un de ses villages d’origine porte un nom de plantation d’arbres.


Une réponse à “T comme Toponymie”

  1. Merci pour la mention.
    Une dernière chose, ce ne sont pas des mots barbares

Répondre à Sophie Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.


Continuez votre lecture

À propos de l’auteur :

Actualité

Mes services

Parlons ADN

Catégories

Rechercher

Archives

Membre de

Hébergement

Ce blog est hébergé depuis 2012 chez Infomaniak. Utilisez ce lien pour héberger vos blogs ou votre cloud sur leurs serveurs


Testez
MyHeritage

Abonnez-vous
au blog

Ne ratez plus nos mises à jour, inscrivez vous et vous recevrez un mail par semaine reprenant les derniers articles publiés sur le blog

Nous ne spammons pas ! Consultez notre politique de confidentialité pour plus d’informations.